Jess ecouta son récit avec attention, comme à son habitude. Elle sourit à l'evocation des petits papooses se doutant qu'il voulait par ce mot "exotique" parler d'enfants. Il faut dire qu'elle n'était pas du tout versée dans la culture indienne et n'en connaissait pas leur dialecte.
Elle était un brin génée de ce regard intense qu'il lui envoya alors, lui procurant comme à chaque fois un frisson issus du creux de ses reins se propageant en un eclair jusqu'à la base même de sa chevelure blonde.
Sans doute parlait-il d'elle à l'evocation d'un bonheur probable avec une squaw, mais elle décida de ne rien montrer de sa compréhension.
Touchée par le récit, elle posa une main delicate sur sa puissante epaule :
J'suis sure que tu trouveras ton bonheur sur ces terres : de l'or bien sûr et cette famille que tu fonderas assurement.
Je m'souviens de cette prédiction qu'tu m'avais faite, le jour de notre première rencontre ... ché pas si tu t'souviens mais moi elle m'a marqué ... Tu m'avais promis un avenir heureux, ressemblant à celui qu'tu desires dailleurs. Pourtant, vois-tu, depuis, rien de tel m'est arrivé ! Au contraire, j'me suis laissée enfermer dans une relation en laquelle j'avais cru, mais qui s'est revelée catastrophique. On m'voulait "soit belle, fait d'bons oeufs au bacon, de beaux enfants, et tais toi" ... pour résumer... Bref, à mille lieux de c'que je suis. Alors vois-tu ch'uis un brin dépitée par les choses de l'amour en c'moment.
Enfin tu dois t'en ficher, j'sais pas pourquoi j'tai raconté tout ça ...
Un long soupir ponctua cette confidence, puis, se ressaisissant elle fouilla dans sa saccoche en peau pour en extraire fièrement le calumet. Celui qu'il lui avait offert précedemment.
Tu vois, il m'accompagne toujours, et à chaque fois que j'l'utilise, j'repense à toi bel indien. J'pensais pas t'revoir un jour en fait ...
J'ai pas eu l'temps de te l'dire depuis tout à l'heure mais ch'uis contente que nos pas nous aient à nouveau réunis.