Perdu ?

DeletedUser14

Invité
« Finalement, qu’est ce que la vie ? »

Fatenia marchait, puis chevauchait tranquillement, sur le dos de sa monture qui le ballotait. Aucune direction n’était imposée par le cavalier qui réfléchissait, perdu dans ses pensées mélancoliques. Il repensait à sa femme qu’il avait enterrée vivante dans un accès de colère, de comment il avait feint la stupidité pendant des années, de ce qu’il en avait suivi. Ces femmes qui le considéraient trop benêt pour avoir des désirs sexuels et qui avaient finies violées puis égorgées dans leur propre domicile, bien fermé à clé, la fenêtre ouverte qui laissait courir le vent sur leur cadavre chaque jours plus rejoint par les mouches. Oui, il avait tué des gens, détruit la vie de nombreuses femmes, qu’elles soient encore vivantes ou bien en train de pourrir dans un taudis éloigné des villes. Nombreux devait être leurs enfants courant après sa chimère, promettant d’égorger celui qui avait devant eux tué celle qui les choyait.
Oui, il avait annihilé des familles en brisant les femmes… Et pourtant, avant, jamais il n’avait fait cela sans éprouver une profonde satisfaction. Il avait toujours adoré ce sanglot qui précédait un affaissement totale de sa victime. Ce point de rupture si marqué, celui qui montre la dame passant d’une position de résistance, le dos gonflé, les épaules raides, à des épaules voûtées.

Oui, il se souviendrait de cette demoiselle qui l’avait aimé. Il était rentré dans un bar, avait tué les gens trop bruyants, et vidé plusieurs bouteilles avant de voir une jeune danseuse s’approcher de lui. Elle lui avait susurré son admiration, son amour, et lui avait promis son corps et son âme en échange d’une fuite commune.
Fatenia avait souri.
Ils étaient montés.
Ils avaient partagé le lit et la rose, du moins au début.
Sous l’effet de l’alcool le gibier de potence avait pris la mâchoire de la fille d’une main, l’avait pressée avec force, l’empêchant de crier. Il l’avait attachée, bâillonnée.
Il se tenait droit, regardant ce corps nu n’offrant plus aucune résistance. Dans ses yeux, une étincelle de cruauté qui disparut, trop vite, inhabituellement, les poings crispés se desserrèrent sans demander la permission, le rictus sadique s’en alla du côté d’un champ de bataille. Fatenia était nu, plus aucun plaisir pour cette future torture. Il frissonna. Il avait peur. Pourquoi cela ne lui plaisait donc plus, pourquoi cela ne continuait pas d’élancer chez lui ce plaisir testostéroné de puissance et de maîtrise haineuse ?
Il avait tout fait, l’avait écorchée, déclaré de force l’indépendance de certaines parties du corps de la jeunette, uriné sur des plaies sanguinolentes, écouté avec attention les cris étouffés par le chiffon, et il avait fini par l’huilée avant de jeter une allumette.
Tout cela sans sourire. Sans ce rire macabre qui créait autrefois des jouissances rocambolesques, sans rien.
Il n’avait plus rien, n’était plus rien.
Depuis ce jour, depuis l’assassinat d’un espoir tenu pour une jeune amourachée, il était comme un spectre dans l’ouest, errant et semant la mort et le désespoir sans en tirer aucun profit émotionnel.

Oui, c’était terrible. Et aujourd’hui, il est là, sur son cheval qu’il n’a plus envie d’égorger, il crache au sol en se demandant ce que la vie lui réserve. Rien d’autre, en vérité, que de chercher une vérité, une personne qui saura lui rendre le plaisir de tuer. Et pour cela, des vies se briseront, beaucoup. Toutes pour la sienne.

Égoïste, vénal, il était le symbole de la survie. Survie futile.

Il recrache, un larme sort et coule, lentement, avant de disparaître au milieu de la sueur puis de sécher, s’immortalisant sur la joue d’un fantôme humain.

« Un jour, je trouverais un femme… Une femme que je saurais aimer. Je l’ai trouvée, elle a fuit. Je ne suis plus personne, on ne peut plus m’aimer. Tout ça parce qu’on ne m’aimait pas avant. »

Ouroboros, lui, riait.
 
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