Bonsoir Jubaka,
Je te trouve un peu dur avec Hartu, bon d'accord, il n'a peut-être pas eu les mots justes pour parler des bienfaits de la colonisation .
Pour exemple ... il n'a jamais dit de telles choses:
[...]oui il paraît même que des expériences médicales sur les juifs seraient sortis des choses biens pour la médecine, merci la solution finale
Afin d'apporter (en ce qui concerne la France) des infos et d'étayer les propos d'Hartu, cet article peut donner un autre regard sur la colonie française.
Je ne dis pas que la vérité émane de cet article mais, ça laisse réfléchir/supposer, de ce qui aurait pu-être été aussi, une réalité.
Cet article essaie de mettre en lumière, autant les bienfaits que les méfaits causés par le colonialisme français.
Ici aussi, les avis sont partagés.
A chacun son interprétation, ses convictions ...
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Un autre regard sur la colonisation
Les grands consensus d’opinion dépourvus de toute voix opposante provoquent immanquablement en moi une réaction de scepticisme et m’incitent à me faire l’avocat du diable. Ainsi la clameur contre les prétendus « bienfaits » de la colonisation m’a poussé à essayer de m’informer là-dessus. Partant d’une ignorance à peu près complète, j’ai passé des heures de recherche sur internet pour voir si la colonisation n’apporta, malgré la prédominance de méfaits, quand même quelques bienfaits.
Mais, pour commencer, il faut préciser de quoi on parle, parce que la colonisation n’était pas un phénomène homogène. Elle n’était pas la même dans les colonies françaises, anglaises, espagnoles, portugaises, hollandaises, italiennes, allemandes et arabes. On parle donc ici de la colonisation française, mais ici aussi il y avait des différences entre l’Algérie, le Gabon, le Tchad, la Martinique, la Nouvelle-Calédonie, etc. De plus, entre le début des colonisations au XIXe siècle et la fin de celles-ci vers 1960, les attitudes avaient évolué. Déjà, après la Première Guerre mondiale, les attitudes avaient changé. La mise en place d’une politique d’éducation et de santé est devenue un des objectifs mis en avant par les pays colonisateurs. Comment alors condamner globalement et catégoriquement « la » colonisation ? Surtout faut-il remettre les méfaits des colonisateurs dans le contexte de la mentalité de l’époque. Ce que nous condamnons unanimement, aujourd’hui, ne semblait pas toujours condamnable alors. Les explorateurs de l’intérieur de l’Afrique étaient des apprentis anthropologues qui ont contribué de façon décisive à la définition intellectuelle du racisme scientifique par leurs descriptions des populations indigènes, précisant la largeur du nez, les cheveux crépus, etc., et décrivant aussi le niveau de vie rudimentaire. Dans la logique tantôt chrétienne tantôt progressiste des Européens du XIXe siècle, il apparut vite évident que l’homme blanc, parvenu à un haut degré de civilisation, devait faire bénéficier ces populations des bienfaits de cette civilisation. Les Eglises ajoutaient qu’il importait avant tout de sauver les âmes de ces peuples en les christianisant, puisque au XIXe siècle il semblait évident que l’animisme et le fétichisme des peuples africains n’étaient que des superstitions. Ainsi, la colonisation supposait une action civilisatrice à la fois sur le pays et sur le peuple. C’est la domination d’une civilisation avancée sur des peuplades vivant selon des traditions ancestrales. Si cette vision des choses nous scandalise aujourd’hui ce n’est pas seulement parce que nous avons plus de respect pour les peuples « primitifs », mais aussi moins de respect envers notre propre civilisation. Nous avons même une tendance à idéaliser les cultures primitives au détriment des hautes cultures européennes, une attitude incompréhensible au XIXe siècle.
Mais si, à l’époque, il y avait un but civilisateur qui semblait à leurs yeux noble, ce but fut vite oublié, remplacé par la répression et l’exploitation. En 1887 et jusqu’à 1946, le gouvernement français imposa le régime de l’indigénat, qui était un recueil de mesures discrétionnaires destinées à faire régner le « bon ordre colonial », celui-ci basé sur l’inégalité : les Noirs étaient privés de la majeure partie de leur liberté et de leurs droits. Travaux forcés, injustices, brutalités, meurtres étaient choses courantes. Ce n’était qu’à partir de 1946 que des droits étaient peu à peu accordés aux Noirs. Les pays colonisés étaient assujettis à la métropole économiquement et politiquement : économiquement par la vente exclusive des matières premières à la métropole et l’achat exclusif des produits manufacturés métropolitains. Mais au moins les colonisateurs ont-ils supprimé vers le milieu du XIXe siècle l’esclavage, très répandu dans les pays islamisés avant la colonisation française. Malheureusement, cette suppression par la loi n’a jamais pu être complètement obtenue.
De nos jours, le poids de l’histoire coloniale dans l’historiographie des anciennes puissances coloniales a peu à peu évolué d’une tentative de légitimation idéologique de la « mission civilisatrice » de l’Europe vers une analyse culpabilisante des crimes infligés aux colonisés. Cette évolution attribue aux indigènes colonisés un statut de victimes reconnues. L’histoire coloniale est ainsi devenue l’histoire des colonisés, les colons en étant bannis et refoulés vers un ghetto moral. Mais ces colons, qui étaient-ils ? Des aventuriers ? Des paysans ? Des ingénieurs ? Des fonctionnaires ? Avaient-ils tous la même attitude envers les indigènes ou est-ce que certains étaient plus humanistes, plus respectueux des Noirs ? Tous des salauds ou faut-il nuancer ? Après 1946, les colons étaient certainement très différents de ceux du XIXe siècle. Karen Blixen, l’auteur de la célèbre autobiographie Une ferme en Afrique serait un exemple d’un colon « éclairé » qui respectait sincèrement les Noirs. Dans quelle mesure était-elle une exception ? Combien de Karen Blixen y avait-il en Afrique noire ?
Face à l’affligeant poids des méfaits des colonisations, il est politiquement incorrect d’évoquer d’hypothétiques bienfaits, mais, à mes risques et périls, j’oserai en mentionner quelques-uns bien documentés :
Les infrastructures étaient construites principalement pour les colons eux-mêmes, mais il est permis de supposer que les indigènes en ont aussi tiré quelques avantages. Surtout, comme Jacques Marseille précise, à la fin de la colonisation vers 1960, toutes les infrastructures ont été laissées aux Noirs.
Jacques Marseille (professeur à la Sorbonne, directeur de l’Institut économique et sociale) :
A la fin de la colonisation en 1960, la France avait bâti en Afrique 2 000 dispensaires en état de fonctionnement, 600 maternités et 40 hôpitaux. De plus, la France avait construit 18 000 kilomètres de voies ferrées, 215 000 kilomètres de pistes principales utilisables en toutes saisons, plus de 50 000 kilomètres de routes bitumées. Elle laissait également 63 ports équipés et 196 aérodromes.
Sur le plan de l’éducation dans les colonies, des efforts ont été accomplis par la métropole et on comptait deux millions d’enfants scolarisés en Afrique noire - 16 000 écoles primaires et 350 établissements secondaires, collèges, lycées, fonctionnaient. La France a porté également ses efforts vers la formation puisque 96 % des instituteurs étaient Africains au moment de l’indépendance. Les 4 % restant sont représentés par 28 000 enseignants français, soit un huitième du corps professoral national.
Au niveau de la santé, de nombreuses maladies ont été éradiquées, et la mortalité infantile a fortement diminué dans toute l’Afrique noire colonisée. Déjà, dans les années 20, le Dr Eugène Jamot avait largement contribué à éradiquer la maladie du sommeil.
Contrairement aux idées reçues, les colonies africaines n’ont pas rapporté d’argent à la métropole. Certes, certaines compagnies se sont enrichies et des particuliers ont fait fortune grâce à la colonisation, mais, dans le bilan final, elle a ruiné à la fois la Maison France et surtout le continent africain. Les investissements dans les infrastructures et les subventions aux productions agricoles ont coûté plus cher que ce que les colonies ont rapporté à la métropole.
(Réf. : Jacques Marseille, Empire colonial et capitalisme français, histoire d’un divorce, 2004.)
La lutte contre les fléaux sanitaires d’Afrique, le paludisme, lèpre, peste et tétanos, est un des bienfaits de la colonisation le plus évident, mais un autre bienfait non négligeable est l’apport de la culture française comme deuxième culture. Affirmer que l’assimilation d’une deuxième culture supprime la culture d’origine n’est qu’un absurde préjugé, parce que la culture que l’on acquiert pendant la jeunesse est indélébile. Sans la culture française, c’est-à-dire surtout la langue, les Africains qui écrivent des articles pour Agoravox condamnant la colonisation n’auraient pas les moyens de le faire.
Et la situation actuelle dans les anciennes colonies ? Le produit brut (PIB) par habitant est inférieur à celui de 1960. La responsabilité des régimes locaux incompétents ou corrompus est incontestable. Les Etats dilapident les richesses naturelles, contribuant à la désertification et à la déforestation. Ils sont incapables de progrès, et restent d’éternels assistés. L’ethnie paraît de plus en plus revendiquée comme communauté politique.
L’Afrique est une des seules régions du monde à négliger ses paysans, alors que, même dans plusieurs pays d’Amérique latine, le revenu des paysans est protégé et subventionné et la terre prend de la valeur. En Afrique, la terre ne vaut rien, ce qui génère la désertification et l’urbanisation galopante. La crispation sur les traditions et l’absence de changement des mentalités et des comportements rendent la crise de développement insurmontable à court terme. Il suffit de lire des reportages comme celui de Corinne Hofmann, La Masaï blanche, pour se rendre compte du niveau de vie et de la mentalité dans les villages africains. Dire que notre civilisation n’a rien à apporter aux peuples africains n’est qu’une idéologie nihiliste anti-occidentale et en même temps une vision idéaliste de la vie dans la grandiose nature de l’Afrique. Malgré le développement de l’éducation, la croyance dans la sorcellerie reste très vivante, symptomatique des résistances au changement et à la modernité.
Il serait intéressant de spéculer sur le développement économique et politique des pays colonisés s’ils n’avaient jamais subi la colonisation. L’exemple de l’Ethiopie suggère que ces pays ne seraient guère mieux lotis aujourd’hui. En effet, l’Ethiopie n’a jamais été colonisée, mais son développement aujourd’hui n’est pas mieux qu’ailleurs en Afrique.
Si mes recherches ont confirmé mes doutes quant à l’objectivité de la pensée unique concernant la colonisation, je ne cherchais nullement à la justifier, mais seulement à mieux la connaître et à la comprendre. Je cherchais des faits et non pas des jugements. Je laisse ceux-ci aux historiens, seuls à avoir les connaissances et la compétence de faire un jugement là-dessus.
Suggestions de lecture :
Jacques Boisson - L’Histoire du Tchad
Blaise Ngando - La France au Cameroun
Jean-Noël Loucou - Histoire de la Côte-d’Ivoire
Nicolas Metegue N’Nah - L’Histoire du Gabon
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Une visite inutile comme solde de tout compte : Il faut une vraie reconnaissance des crimes de masse[/SPOILER]
SOURCE
http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/un-autre-regard-sur-la-37664